Alors que les antennes de plusieurs médias audiovisuels guinéens sont brouillées depuis plus de six mois, les putschistes du 5 septembre 2021 ont franchi une nouvelle étape dans leur volonté de mettre au pas les journalistes qui avaient applaudi à tout rompre le coup d’État.
Depuis que les militaires au pouvoir à Conakry ont décidé de retirer les agréments d’exploitation des radios FIM FM, Radio Espace FM, Sweet FM, Djoma FM et la télévision Djoma en invoquant un hypothétique « non-respect du contenu des cahiers des charges », une seule expression nous vient à l’esprit : il faut se garder de déjeuner avec le diable, même lorsqu’on est sûr de posséder une longue fourchette. Hélas, les journalistes guinéens, qui ont été complaisants à l’endroit des putschistes l’ont appris à leur dépens.
En tout six médias audiovisuels réduits en silence. De mémoire de Guinéens, il s’agit d’une situation inédite. Jamais, les citoyens guinéens, qui ont pourtant déjà connu pire, n’ont assisté à une telle atteinte grave à la liberté de la presse. Surtout que pendant plus de dix longues années, ces mêmes médias qui font l’objet de suspension, ont vitupéré contre le régime du président Alpha Condé, ils l’ont vilipendé, calomnié, diffamé sans être inquiétés. À l’époque, ils s’étaient substitués à l’opposition et se comportaient comme de véritables adversaires du régime. Leur traitement de l’information n’était ni sincère, ni objectif.
Malgré ces outrances et les coups de canifs aux règles déontologiques du métier de journaliste, Alpha Condé, bon seigneur, avait laissé faire, persuadé que les joutes font partie du jeu démocratique, lequel ne saurait exister sans la liberté de la presse. Il considérait les excès des journalistes comme inhérents à l’apprentissage de la démocratie dont la fille ainée est la presse. Malheureusement, cet héritage est aujourd’hui dilapidé, liquidé par des usurpateurs ignorant tout du fonctionnement de l’État.
C’est la preuve, si besoin en était encore, que Mamadi Doumbouya et les siens ont perdu le sens des réalités à force de consommer la « poudre blanche » provenant des pays d’Amérique du Sud qu’ils sont devenus de grands trafiquants. En interdisant les médias qui l’empêchent de consommer tranquillement ses substances illicites, le président autoproclamé est désormais seul contre tous. D’ailleurs, il est permis de se demander si ce dernier est en possession de l’ensemble de ses facultés. Doit-on laisser à la tête de l’État un individu dont les actes défient le bon sens le plus élémentaire ?
À l’évidence, il faut s’inquiéter de l’avenir de la Guinée, qui va inéluctablement connaître des lendemains incertains. Il ne fait l’ombre d’aucun doute que le pays va entrer dans une zone de forte turbulence aux conséquences imprévisibles, à cause notamment du refus des autres forces vives de la nation d’avaliser une telle décision inique. On est à peu près sûr que le peuple guinéen, connu pour être contestataire, ne se laissera pas faire.
C’est l’occasion de rappeler à Mamadi Doumbouya, qui ne cache pas son admiration pour le dictateur Sékou Touré, qu’on ne gouverne pas seul mais avec le peuple. L’époque où des régimes autoritaires et dictatoriaux soumettaient les peuples à leurs diktats est révolue. La prison, la répression, les mesures autoritaires comme la fermeture des médias et les liquidations physiques ne pourraient contraindre la volonté populaire. Rien ne peut se faire sans l’assentiment des citoyens. Or le peuple, qui est le partenaire des dirigeants qui se respectent, est attaché aux médias. Ce n’est qu’une illusion de vouloir faire du Sékou Touré sans Sékou Touré. Voilà pourquoi la quasi-totalité des citoyens guinéens réclament le retour au pouvoir du président Alpha Condé.
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